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Feb

Niko Pirosmani, Promeneur entre les mondes

L’exposition « Niko Pirosmani – Promeneur entre les mondes » regroupe près d’une trentaine de tableaux du peintre géorgien (1862-1918) présentant le panorama réel et imaginaire, d’un grand calme, d’une époque en pleine transition. Les imposantes figures de l’artiste, au graphisme puissant, sont diverses : un train la nuit en pleine campagne, une femme au bock de bière, un sanglier monumental et, parfois, des animaux comme une girafe ou un lion, issus de territoires fantasmés. Rarement datés, ses tableaux sur toile cirée sont largement composés en noir et blanc, animés par la présence de bleu ou de blanc.
Autodidacte, vagabond, promeneur entre ville et campagne, Pirosmani incarne la vision populaire moderne de l’artiste marginal lucide. Loin des espaces symboliques intermédiaires que sont les galeries, les associations d’artistes et les musées, Pirosmani a forgé une œuvre imprégnée de modestie dans les tavernes et les étables de Tbilissi et de ses alentours, travaillant à la commande ou proposant son art en échange de nourriture. Il s’éloigne de l’image du peintre naïf muré dans sa solitude et bâtit un art qui semble appartenir à tous, à l’instar de Van Gogh. Regroupant pour la première fois les œuvres de ces deux artistes dans un même lieu, « Niko Pirosmani – Promeneur entre les mondes » revêt ainsi un caractère exceptionnel. Le peintre géorgien est en effet présenté à la Fondation en regard de six œuvres de Van Gogh, réunies sous le titre « Vincent van Gogh : Vitesse & Aplomb ». Produites entre 1884 (la période hollandaise) et 1889 (la période provençale), ces toiles transmettent, elles aussi, un sentiment de vitesse et témoignent d’un humble regard porté sur les gens et les choses entourant l’artiste néerlandais.  L’influence de Pirosmani sur l’art et la vision de ses contemporains est manifeste. Son œuvre se trouve prise dans un faisceau d’émulation qui nourrit alors les différentes avant-gardes de l’époque, russe et parisienne. Alors attentive à des artistes dont le travail, vu comme « authentique », signale un rejet du conformisme de l’académie, l’avant-garde russe accorde une belle présence à Pirosmani lors de l’exposition « La Cible », tenue à Moscou en 1913. La gravure de Pablo Picasso Portrait de Niko Pirosmani (1972), présentée dans l’exposition à Arles, raconte pour sa part l’emprise de l’œuvre du Géorgien sur le cercle de l’avant-garde moderne française.
L’héritage qu’il a transmis à la création contemporaine mérite, lui aussi, qu’on s’y attarde. Ponctuée d’hommages se déployant au second étage de la Fondation, l’exposition accueille entre autres une œuvre inédite de Tadao Andō : une table monolithe monumentale composée de roses bleues, « tombeau métaphorique à la mémoire de cet artiste », selon les mots de l’architecte japonais. L’influence de Pirosmani se poursuit de manière inédite à travers des artistes telles Raphaela Vogel et Christina Forrer. Les évènements de l’Histoire ont tenu éloigné de France cet artiste pendant de nombreuses décennies. Il est grand temps aujourd’hui de rendre ses créations accessibles au grand public.
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Par destinationtogeorgia|Vie culturelle|0 comment

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