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Jan

ADRÉNALINE du CAUCASE

En avril dernier, trois des meilleurs free riders du monde, dont un Français, sont allés en Svanétie, dans le nord de la Géorgie, pour une session inédite. Le photographe qui les accompagnait témoigne.

C’était une idée de Samuel Anthamatten. Et lorsqu’un des meilleurs freeriders du monde émet une suggestion, on l’écoute ! Guide de haute montagne à Zermatt, il connaît non seulement les Alpes suisses par coeur mais il participe à de nombreuses expéditions ailleurs. Les montagnes de Svanétie, en Géorgie, donc. Un spot qui alimente les rumeurs dans le monde de la glisse. Samuel invita le Français Léo Slemett à se joindre à lui ; ce dernier, outre qu’il figure en tête de liste de ses meilleurs amis, fut aussi l’an dernier vainqueur du Freeride World Tour. Un troisième larron vint compléter cette dream team : Markus Eder, qui filma l’Alaska pendant des années, ainsi que beaucoup d’autres spots méconnus.
Nous voici à Kutaisi, la troisième plus grande ville géorgienne, direction les montagnes du Caucase et le village de Mestia, en voiture, sur des petites routes de plus en plus verglacées. À l’horizon, à la frontière russe, se dessine la masse impressionnante du mont Ushba (4 710 mètres). Pas de chance, à notre arrivée les conditions météo rendent impossible une reconnaissance en hélicoptère. C’est donc l’occasion de découvrir notre base, bientôt classée au Patrimoine mondial de l’Unesco. Mestia, ses « koshkis », tours défensives médiévales, sa culture locale et ses anecdotes croustillantes. Le paisible et accueillant village de deux mille âmes était, avant une opération de « nettoyage » par l’armée et la police, le refuge des brigands du nord du pays. Ce n’est qu’au troisième jour que le ciel s’éclaircit. Un hélico nous dépose sur les crêtes, en compagnie de Flory Kern et de Luca Rolli, nos guides locaux. Pendant plusieurs jours il a beaucoup neigé et nous devons nous montrer extrêmement prudents. D’après Flory et Luca, la voie la plus sûre pour commencer se situe juste au-dessus de Mestia. Notre premier contact avec la poudreuse a donc lieu en dessous de 3 000 mètres d’altitude. Sam, Léo et Markus s’élancent avec une énergie trop longtemps contenue, laissant dans leur sillage de spectaculaires gerbes blanches. Une neige et des conditions météo idéales. Quant à moi, c’est à ce moment-là que je réalise, au beau milieu de cette Svanétie inconnue, que je n’aurais jamais pensé me retrouver en Géorgie, sur le Vieux Continent. Ici, tout m’évoque l’Alaska où je suis allé de nombreuses fois. La neige s’accroche aux parois des montagnes en créant des pics, des épines et de gros oreillers, comme là-bas. Et la chose la plus étrange est de contempler ces formes si particulières que l’on trouve généralement près de la mer et à basse altitude. Les retrouver ici, dans des conditions complètement différentes n’en finit pas de me surprendre.
De retour à l’hôtel, nous consultons attentivement les cartes. C’est là que je prends toute la mesure du potentiel de la région. Mestia se situe à 1 300 mètres d’altitude et les plus hauts sommets, comme le Tetnuldi, tutoient les 5 000 mètres. Côté russe, à une trentaine de kilomètres à vol d’oiseau, l’Elbrouz (5 642 mètres, le « toit de l’Europe ») domine le Caucase en majesté. Il y a tout pour freerider en haute montagne, dans des conditions extrêmes. Après cette journée, de lourds nuages chargés de neige roulent dans le ciel. Impossible de tenter une sortie. Le lendemain, de violentes rafales de vent laissent peu d’espoir. Nous profitons néanmoins d’une brève clémence des éléments pour sauter dans l’hélico : nous voulons absolument survoler l’imposant Ushba et, surtout, jeter un coup d’oeil sur sa face nord, qui n’a jamais été skiée.
Pas évident de s’en rendre compte mais, à première vue, les grandes étendues de glace sombre parsemées de névés offrent un terrain qui n’est pas skiable à cette période. Il pourrait le devenir plus tard dans la saison. Après des chutes de neige de 50 centimètres, la météo joue en notre faveur : les deux derniers jours de notre expédition se déroulent sous le soleil. Le vent est tombé. Dès le début de notre séjour, nous avions estimé le potentiel de ce morceau de Svanétie, et le trio de freeriders est avide de dévaler les pentes depuis les lignes de gros oreillers neigeux jusqu’au pied des immenses glaciers. Et quand vous lâchez des pointures telles que Léo, Sam et Markus dans un paysage pareil, les résultats sont garantis. Les terrains à pic aux lignes marquées les poussent à donner leur meilleur niveau. Quant à moi, derrière mon appareil photo, je suis le témoin privilégié de cette session d’un engagement et d’un fun exceptionnels.

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By destinationtogeorgia|Uncategorized|0 comment

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